cultiver son potager à l'ile maurice - récolte de tomates

Cultiver son potager à l’Ile Maurice

Quand on avait pris la décision de s’expatrier à l’île Maurice, on avait pour projet de créer un petit espace potager pour produire nos propres légumes. En France, malgré l’espace limité de notre balcon de 7 m², on commençait déjà à le faire dans des bacs plus ou moins grand. Imaginez notre enthousiasme avec un petit jardin…

En France, il y a beaucoup de ressources, que ça soit sur internet ou dans les livres, qui permet de s’informer sur les techniques de jardinage. Mais étrangement, on a constaté un manque flagrant d’informations sur la culture potagère en climat tropical. Il y a bien quelques groupes Facebook, où Mauriciens et résidents distillent quelques informations ici et là, mais sans plus. Cela nous a poussés à expérimenter et à apprendre par nous-même, à jardiner avec les conditions climatiques spécifiques de l’Ile Maurice

Dans cet article, on partagera notre expérience et nos (humble) conseils pour créer et entretenir un potager à l’île Maurice. Ça sera en quelque sorte un journal qu’on essayera de maintenir à jour pour vous permettre, vous aussi de réussir de produire vos légumes.

Comprendre le climat avant de cultiver son potager à l’Ile Maurice

Malgré la taille de l’île, qui est relativement petite, chaque région a ses propres caractéristiques liées aux différents micro climat, et certaines cultures vont mieux fonctionner que d’autre.

Le climat du littoral : moins favorable à la création d’un jardin potager

Commençons par les régions côtières, notamment le nord et l’ouest. Pourquoi est-ce que ce n’est pas la meilleure région pour cultiver son potager à l’Ile Maurice ? Tout simplement parce qu’il fait chaud et sec. La pluviométrie est plus faible qu’ailleurs. Il y a 2 ans, nous n’avions pas eu une seule goutte d’eau pendant 2 mois, si ce n’est quelques crachats, insuffisant pour humidifier la terre, qui sèche très vite après.

L’été, on dépasse facilement les 35 degrés au soleil. Beaucoup de culture ne supporte pas cette chaleur. Les tomates ne produisent plus trop de fruit car les pollens sont moins fertiles à cette température. Les pak-choi, que nous faisons pousser régulièrement, se développent beaucoup moins bien, et se fait systématiquement attaqué par des chenilles qui mangent le coeur de la plante.

Le climat du centre : la meilleure région pour cultiver ses légumes

Les températures sont plus fraîches, ce qui est idéale pour les plantes. Il y a aussi beaucoup plus de précipitation. Chaleur + précipitation + temps ensoleillé = c’est la garantie d’avoir de beaux légumes presque tout le long de l’année.

Si vous observez bien, vous constaterez une grande différence au niveau de la végétation. Tout est vert dans les hauts, et au fur et à mesure que vous descendrez vers la côte, la faune change et la couleur aussi.

Si vous êtes un amateur de fruits et que vous souhaitez avoir un verger, le centre de l’île est la meilleure région pour planter des arbres fruitiers : mangues, des litchis, des longanes…

Le climat de l’est : Une région particulière

Je vous ai dit qu’il fait chaud et sec sur le littoral ; la côte Est est une exception. Il y a plus de précipitations et il y a surtout, une brise, présent toute l’année, ce qui donne des températures légèrement plus fraiches et une humidité plus présente. Et on sait que ce sont des conditions qui sont plus propices à une culture potagère.

Il y a beaucoup de culture de légumes vertes, de piments ou d’aubergines, chose que vous ne verrez pas dans l’ouest par exemple, sauf dans des petites parcelles privées près des Gorges de la Rivière Noire.

Cultiver son potager en hiver ou en été ?

Venant d’Europe, cette question peut sembler étrange. Mais à l’Ile Maurice, on cultive ses légumes en hiver. Les températures y sont plus fraîches et le soleil est moins fort. En été, il fait chaud et les pluies diluviennes peuvent dévaster des cultures entières, sans compte que les cyclones peuvent faire de très gros ravages où ils traversent l’île.

Dans les supermarchés, le choix de légumes augmentent significativement entre avril/mai et notamment les tomates dont les prix sont au plus bas vers juillet ; à l’inverse des fruits, que vous trouverez plutôt en été (litchis, mangue, ananas…)

Je vous invite également à consulter le calendrier de plantation sur le site internet de Food and Agricultural Research and Extention Institute

Pourquoi il faut cultiver ses propres légumes ?

Certaine personne le font parce que c’est une passion, d’autre parce que c’est une activité qui détend le corps et l’esprit, idéal pour ceux qui ont une vie un peu stressante. Mais à Maurice, je dirais que c’est aussi une question de santé et parfois, une économie non négligeable, quand on fait le rapprochement avec le prix des légumes qui montent et le pouvoir d’achat des locaux.

Le problème de la culture intensive à l’Ile Maurice

J’ai discuté de ça avec plusieurs mauriciens et certains expats bien établis et très au courant du sujet. Le problème à Maurice, c’est que l’agriculture est tournée vers une solution qui utilise les pesticides à outrance. Les planteurs ne gagnent pas beaucoup d’argent et ils ne peuvent pas se permettre de perdre des récoltes et d’avoir des rendements beaucoup moins élevés. Résultat, l’utilisation de produit phytosanitaire est systématique et il semblerait que le cocktail soit … conséquent.

Mais alors, me diriez-vous, c’est pareil qu’en Europe, tous les agriculteurs utilisent plus ou moins de pesticides dans leur champ. Oui, mais les planteurs locaux utilisent des produits qui ne respectent pas les mêmes normes CE, et utilisent donc des produits qui peuvent être (potentiellement) dangereux pour la santé.

Il existe toutefois des magasins qui vendent des légumes BIO. Mais aucun moyen d’en être sûre, la traçabilité est parfois incertaine ou inexistante. On a constaté une fois, le camion d’une enseigne BIO, s’approvisionner au bazar (marché local)…

Cultiver son potager à l’Ile Maurice prend donc tout son sens : on récolte et on mange nos légumes 100% bio. Alors c’est vrai, les rendements ne sont pas là et on doit respecter les saisons. Mais c’est le prix pour manger des légumes sains.

Cela peut revenir moins cher

Le coût de la vie à Maurice augment, les fruits et légumes, parfois, atteignent des prix équivalent à ce qu’on pourrait trouver en Europe. Avoir son propre potager est alors une solution, qui permet de diminuer son budget pour les légumes.

Selon ce que vous cultivez, vous pouvez avoir de très gros rendements. Pour un sachet de graines à 2 euros (100 rs), vous pouvez avoir assez de récolte pour plusieurs mois. Exemple : les salades, les pak-choi, les choux, la pomme de terre… Avec 4 plants de courgettes, il est possible d’en manger toutes les semaines. Quand ça commence à prendre, vous en aurez beaucoup à ne plus savoir qu’en faire.

Tout ce que vous avez besoin, en réalité, c’est un espace dans votre jardin, des pots, de la terre et du fertilisant type compost ou fumier, qui se trouve à des prix raisonnables, et vous pourrez produire facilement vos légumes.

Sans compter que l’eau à Maurice, n’est pas chère du tout et bien sûr, les graines également (entre 1 et 2 euros). D’ailleurs, si vous faites vos propres semences, vous n’aurez plus besoin d’en acheter à nouveau, à condition de ne pas prendre des variétés F1.

Notre potager à l’Ile Maurice : nos conseils et notre expérience

Le type de sol à l’Ile Maurice et comment préparer sa terre

On ne parlera que de notre propre expérience par rapport à notre localisation. Dans l’ouest, le sol est soit très rocailleux, soit très argileux. Les deux types de sol sont mauvais pour un potager. Il faut alors travailler le sol ou mélanger la terre si vous n’avez pas une énorme surface à planter.

On a utilisé 2 méthodes qui à l’air de bien fonctionner pour le moment :

  1. la technique de la lasagne : cela consiste à superposer une couche de carbone (feuilles mortes, broyat de bois…), une couche azotée (des tontes de gazons, des feuilles, des épluchures…) et enfin de la terre. En se décomposant, les 2 pemières couches va devenir du compost, parfait pour retenir de l’eau et pour nourrir les plantes.
  2. un mélange de terre de jardin, de terreau et de compost, avec une proportion de 1/3 pour chaque élément.

Vous trouverez souvent du topsoil dans le commerce. J’ai l’impression que c’est juste une terre enrichie avec du compost et de la fibre de coco. Mais à vue d’oeil, je ne pense pas que les proportions de matières organique soit si importantes. Dans les jardineries, le choix du terreau est plutôt limité : terreau de semis ou terreau horticole. C’est donc à nous de faire un peu de mélange.

L’irrigation

Nous utilisons principalement 2 types d’irrigation pour la culture de notre potager :

  • un arrosage classique avec un arrosoir ou une lance d’eau. C’est à mon avis la moins efficace, particulièrement quand il commence à faire chaud car l’évaporation est très importante.
  • l’utilisation des ollas, qui sont des vases en terre cuite enterrés dans le sol. Elle donne de bons résultats avec les tomates, les aubergines, les piments et les courgettes. Dommage qu’on n’en trouve pas Maurice. Ceux que nous utilisons viennent de France (qu’on a ramené dans notre container lors de notre installation ou ramené lors de nos vacances en France).
  • On n’a pas installé de système de goutte-à-goutte, mais je ne vois pas pourquoi ça ne serait pas efficace.
ollas

Mais le plus important dans tout ça, c’est le paillage du sol. C’est particulièrement important dans notre région, il fait chaud et sec ; et il faut retenir le maximum d’eau possible.

Terminons par la fréquence d’arrosage, qui est de 3 fois par semaine et on a une préférence pour arroser tôt le matin.

La fertilisation

On trouve facilement du compost à maurice, que ça soit à Espace Maison, à Mr Bricolage ou dans des groupes Facebook. On a testé différents composts :

  • Le compost de la marque Soil Plus : une qualité irrégulière. On a l’impression que ce n’est pas assez composté et on retrouve des gros morceaux, voir du fumier non composté. Pas le plus adapté si on veut l’utiliser immédiatement.
  • Le compost de la marque Vieille Cheminée : compost fait à base de fumier de cheval. Une bonne texture, rien à signaler dans son utilisation.
  • Le compost de la marque Sea Life : En plus de la composition classique du compost, on retrouve également des algues marines compostées. C’est ce qu’on utilise en ce moment, et je trouve qu’il donne de bons résultats.

En plus de l’utilisation de ces amendements pour le sol, on utilise aussi des engrais liquides et des granulés pour donner un coup de fouet aux plantes pour aider la floraison et la fructification. Dans les commerces traditionnels, pas beaucoup de choix. Il faut se tourner vers des fournisseurs locaux spécialisés comme Silk Agro.

Les variétés de légumes que nous avons cultivé dans notre potager à l’Ile Maurice

Voici un tableau des légumes qu’on a déjà cultivé : ceux réussi et ceux qui n’ont pas donné de super résultat :

Légumes EchecMitigéRéussi
Saladeça a bien marché. Culture à mi-ombre
Haricot vertn’a pas bien marché à mi-ombreça a bien marché. Culture en plein soleil
Haricot mange-toutBon début de récolte puis plus rien
Pak Choi (tom pouce)ça marche bien mais attention aux chenilles début été
Liseron d’eau (brède soufflette)Fonctionne bien mais besoin d’une terre constamment humide
Betterave Aucune réussite pour le moment
Radis Blanc (rave blanc)Peu de réussite (à peine 2 sur une rangée de 20)
RadisFonctionne bien à mi-ombre
CarotteCulture en cours, mais à l’air de bien fonctionner en plein soleil
CourgettePeu de réussite, ravagé par l’oidium
Butternut2 fruits récoltés, avec des graines issues de butternut du commerce
Aubergine (bringelle)Fonctionne très bien. La variété cultivée est une aubergine violette et longue
Piment Cariun rendement moyen
Tomatesrendement moyen avec des variétés importées
Pomme de terre ravagé par le mildiou

Concernant les aromatiques, voici ceux qui fonctionnent extrêmement bien chez nous :

  • Basilic commun et basilic thaï
  • Ciboule
  • Persils
  • Coriandre
  • Lauriers

Les nuisibles et les maladies

On n’utilise pas de pesticide dans notre potager à l’Ile Maurice. On ne traite pas les plantes si ce n’est l’utilisation de produits naturels et biologiques. Quand je dois traiter les insectes nuisibles, j’utilise seulement un mélange d’eau et de savon noir.

En cultivant de cette façon, on s’aperçoit vite pourquoi les Mauriciens utilisent autant de pesticides ; certaines plantes sont très vite touchées par les maladies ou par certains nuisibles. Résultat, soit on a un rendement très inférieur à la moyenne, soit ça ne marche pas du tout.

Parmi les maladies que l’on a rencontre on peut notamment citer :

  • l’oidium : qui a touché particulièrement les plants de courgettes. Cette culture est un vrai échec. Par contre, les plants de butternut ont peu subi. Est-ce une variété résistante ? je ne sais pas, elle venait du commerce. Les traitements classiques à base de lait ou bicarbonate n’ont rien donné.
  • le mildiou : a affecté la plupart des plants de tomate, certaines variétés l’ont été plus que d’autre comme le cuor di bue. Le mildiou a été particulièrement virulent avec les pommes de terre (issus du commerce). Ca n’a jamais marché.
  • les mouches blanches : Apparamment c’est un problème classique à l’Ile Maurice. Mes plants de piments ont été affectés. C’est surement pour cette raison que je n’ai pas de très bons rendements.
  • mouche mineuse : j’en ai eu sur les tomates et sur les haricots mange-tout. Je n’ai pas trouvé de solution.
  • les cochenilles : j’en ai eu sur des plants d’aubergines, je n’ai pas constaté de problèmes particuliers sur eux, on a eu beaucoup de fruits. Par contre, ceux qui se trouvaient sur les plants de courgettes, on à mon avis, avec l’oidium, participé à son échec de culture. Je les traites avec de l’eau et du savon noir.
  • les chenilles : Particulièrement embêtantes sur les pak-chois. On les retrouve lorsque les plants ont une certaine taille, et une fois le coeur mangé, le plant est foutu. Il faut alors arracher et consommer les feuilles restantes.
  • les escargots : particulièrement embêtants quand vous semez en pleine terre ou lorsque les plantes sont jeunes. Ils sont très friands des jeunes pousses de salade, de pak choi et des haricots. Je les retire à la main, la nuit tombée. Surtout je fais attention juste après les jours de pluies.
  • les oiseaux : oui, bien qu’ils soient jolis et agréables à écouter, ce sont de véritables plaies pour les tomates et les piments, surtout lorsque vous n’en produisez pas beaucoup. Tomate vertee ou mûres, ils n’hésitent pas à les manger.

Malgré tous ces problèmes rencontrés, on continue la méthode sans pesticides car, c’est toujours une fierté et un plaisir de manger des légumes plein de goûts et surtout sans produits toxiques.

Pour certains, on fait nos propres semences. On mise sur le fait que, de génération en génération, les plantes développent une résistance aux maladies et aux nuisible. Cette année, c’est la 3e fois que je ressème une variété de tomate, et j’ai l’impression qu’il y a déjà une amélioration. Je vois des traces de mouche mineuse, des mouches blanches qui se posent sous les feuilles, des traces de mildiou et pourtant, la plante a l’air de bien se porter avec des fruits en production.

J’espère que cet article vous aura aidé et vous aura intéressé sur la réalisation d’un potager à l’Ile Maurice. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions.